Gare aux secousses
Les taxis déboulent
Dans le marécage émeraude
Des égarés sniffent
A l’ombre des graffitis
Les chercheurs d’or à l’affût
De fruits en cuir garnis.
Quatre heures du matin
Les travailleurs s’élancent
Les cireurs de pompes
Étalent leur encre
C’est l’heure du tinto
Les gangs s’enclavent
Botero danse et se souvient
Des poires guerrières
Des pigeons pollués.
Goal en jaune le vendredi
Le samedi c’est fête dorée
Salsa, reggaeton, bachata
Ça se trémousse dans le quartier
Incendie d’aguardiente.
Y’a aussi des couteaux pressés
Des fusils aux coins des rues
Quadrillées de toutous bedonnants
Et de militaires muselés
De zombies fumants
Au pied des Eglises
Et des aveugles
Dans le Transmilenio.
Les déplacés tissent
Leurs perles arc-en-ciel
Sur les marchés aux puces
Échec et mat
Entre les habitués
Esprits créatifs
Murs enchantés
Sur la septima
Maïs grillés
Pour deux mille pesos.
Monstre de béton
Bipolaire,
Ensoleillé et pluvieux,
Les gouttes se tarissent
Sur la belle Bogotá.
Poussières de drogue
Ça jongle sur les toits
De petites pommes de terre
Bohèmes.
Bogotá ne cessera d’accueillir
Les touristes, les voleurs
Les réfugiés, les travailleurs,
Indifférente, informelle
Au creux de sa montagne toujours fière.